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Les petites histoires de Nath
29 décembre 2014

Le mur (part 5 fin)

Le jour de ses dix-sept ans, Hans fit le vœu de pouvoir un jour parler avec sa bien-aimée. Il savait très bien qu’il était le seul à pouvoir y faire quelque chose. Certes, il ne pouvait pas, comme par le passé, courir chaque nuit dans les bois pour détruire le mur, une vie n’y aurait pas suffit. En plus, à force, il risquerait d’attirer l’attention, malgré le luxe de précaution qu’il avait prises l’année précédente. Une autre réunion du village pour exposer son point de vue ? Il connaissait déjà la réponse. Pourtant cela restait la seule solution envisageable. S’il arrivait à leur montrer qu’il n’y avait aucun danger de l’autre côté, les habitants se montreraient probablement plus compréhensifs que par le passé. Plutôt qu’une autre réunion qu’il n’était pas sûre de pouvoir mener, il décida de s’en remettre au bouche à oreille. En général ça marchait assez bien. Sitôt dit, sitôt fait, il trouva un de ses camarades de classe, lui chuchota qu’il avait un secret à lui révéler et l’entraîna au milieu des bois. Le garçon, d’abord incrédule, resta muet d’étonnement lorsqu’il aperçut le trou et plus encore quand il vit ce qu’il y avait derrière. Hans lui fit promettre de garder le secret, l’autre acquiesça d’un air entendu et tous deux rentrèrent au village. Comme Hans l’avait espéré, l’autre fut incapable de tenir sa langue et la nouvelle se répandit au village comme une traînée de poudre. L’on fit bientôt la queue près du trou afin de s’assurer de la véracité des rumeurs. Le maire convoqua les habitants à une réunion exceptionnelle où il fut question du mur et de sa démolition éventuelle. Contrairement à la précédente réunion, les gens semblaient plutôt d’accord avec cette idée et Hans s’en félicita. Quelques jours plus tard, une bien étrange procession se dirigeait vers la forêt : c’était un défilé d’hommes et de jeunes garçons armés de pioches, de femmes portant provisions et eau, d’enfants curieux et joueurs. En effet, décision avait été prise d’abattre enfin ce mur grotesque. Hans était, bien entendu, parmi les premiers.

 

Il leur fallut des mois et des mois de labeurs, entre les travaux des champs et les métiers de chacun, pour venir à bout de la partie du mur qui encerclait le village. Les hommes de l’autre côté, d’abord alertés par le fracas des pierres brisées, vinrent proposer leur aide. Tous ensemble, ils frappèrent, cassèrent et déblayèrent. La forêt avait pris des allures de chantier de démolition, mais Hans était en joie. Car, au bout de quelques jours, une brèche suffisamment large lui avait permis de passer de l’autre côté. Il avait enfin pu aborder la demoiselle de ses pensées, portant le doux prénom d’Isabelle. Charmée, cette dernière semblait partager les sentiments du jeune homme et elle avait pris pour habitude de venir personnellement lui apporter à boire pendant qu’il travaillait à la destruction du mur. Et ce fut par une belle matinée de printemps que l’ouvrage fut enfin entièrement anéanti. Les saisons s’étaient enchaînées au rythme du travail, qui n’avait pas cessé malgré le froid et la neige. Tous les habitants, de quel côté qu’ils soient, participèrent à la fête qui fut instituée annuellement afin de célébrer la réunion des deux villages. Et Hans, malgré la place que tenait désormais Isabelle dans son esprit, ne pouvait s’empêcher, en grand rêveur qu’il avait toujours été, qu'il serait formidable que tous les villages du monde entier brisent les murs qui les enferment. Mais ceci est une toute autre histoire...

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